HBC Nantes : Lagarde - Bonnefond : On s’était dit rendez-vous dans 7 ans
Adversaires lors de la finale de 2018, les deux arrières nantais, Baptiste Bonnefond, 32 ans (ex-Montpellier), et Romain Lagarde, 28 ans, se retrouvent désormais sous ce même maillot violet pour un nouveau Final Four. Destins croisés et réunis pour deux joueurs dont les obstacles et expériences ont forgé la résilience et l’envie d’être sur un terrain.

C’est à la fois si près et si loin : que vous reste-t-il de cette édition 2018 exceptionnelle avec ses trois représentants français ?
Romain LAGARDE : Cela reste jusqu’à présent ma meilleure compétition au club. Je me souviens avoir été super excité, avoir ressenti un feeling unique, vraiment très spécial au moment de le jouer. Et puis, bien évidemment, ce mur, complètement fou… C’est une image qui restera gravée à jamais et une expérience à travers laquelle nous avons énormément appris.
Baptiste BONNEFOND : Là-bas, ce qui m’a vraiment marqué, c’est tout le contexte, cette immense fête du handball. Il y avait fatalement une grosse ferveur française de par la présence de trois équipes tricolores. Pour nous qui jouions en demi-finale l’unique équipe non hexagonale, je ne vais pas dire que c’était comme à la maison, mais on a vraiment pu bénéficier d’un soutien incroyable ! Et puis, bien évidemment, avoir soulevé le trophée (sourire)…
En effet, vous êtes rentré titré de votre premier Final Four, 15 ans après celui remporté par Montpellier et un certain Michael Guigou, alors l’une des grandes révélations sur la scène mondiale… encore là en 2018, toujours sous la direction de Patrick Canayer !
B.B : On avait vraiment été très bien encadrés par les plus anciens. Mika (Guigou), évidemment, Vidko (Kavticnic)… On avait une équipe assez jeune. Mais c’est assez étrange, car encore plus que ces deux jours à Cologne, ce qui est ressorti de cette campagne 2017-18, c’est notre parcours, cette confiance construite progressivement car on sortait, il ne faut pas l’oublier, de poule basse. C’était une autre formule à l’époque et il avait fallu que l’on batte Barcelone, puis Flensburg. Je retiens cette histoire d’équipe exceptionnelle avec une finalité follement heureuse, sensationnelle. La demie avait vraiment été explosive face à l’unique équipe non-française. Je me souviens que le scénario « clutch » contre le Vardar, tenant du titre et qui allait d’ailleurs gagner l’édition suivante, nous avait insufflé une espèce de sentiment que rien ne pouvait nous arriver. Ce n’était en rien un manque d’humilité, plutôt un booster incroyable. Je pense que cela nous a vraiment porté pour la finale face au H.
R.L : On était pour certains vraiment, vraiment très jeunes (rire) ! 21 ans pour moi, 22 pour Dragan Pechmalbec, mais on avait autour de nous des mecs en pleine bourre, comme nos Espagnols David, Balaguer et Eduardo, Gurbindo, qui marchaient sur l’eau durant cette saison, un Kiril Lazaro et son expérience incroyable à l’instar d’un Dominik Klein qui avait joué déjà six finales de Ligue des champions et l’avait gagnée trois fois ! Et malgré cela, on était vraiment les outsiders de la compétition… et on a réussi à s’en sortir (rire) ! Bien sûr qu’il y a un goût de trop peu quand tu perds une finale, mais cela restera un bon premier Final Four pour tous. En se présentant face à Montpellier, nous savions tous que nous avions laissé du jus face à Paris… Je me souviens que certains étaient cuits, très utilisés. Maintenant, il n’y avait clairement pas de la fatigue : Diego Simonet avait fait ce qu’il voulait sur ce match ! Il aurait pu tirer les penalties de dos ou les yeux bandés, il les aurait marqués !
C’est le souvenir que vous conservez de ce week-end fou ?
B.B : C’est vrai que toute l’équipe était en grande forme, et puis, c’était le bon moment. Toutes les planètes étaient alignées : un maximum de maturité collective, un climat d’équipe ultra stimulant. D’ailleurs, s’il y a des similitudes à aller chercher entre cette équipe de Montpellier sur la saison 2017-18 et Nantes 2024-25, c’est bien cela ! On est vraiment arrivés gonflés à bloc. L’histoire de notre parcours nous avait blindés mentalement, aucune équipe ne nous faisait peur. C’est avec cette philosophie qu’il faut arriver à Cologne en se disant que, devant nous, ce sont deux matchs de prestige dans un contexte unique. Et qui, même si je ne le souhaite à personne, peuvent être les derniers de notre carrière…
« Ce qui est déjà certain, c’est que ce collectif sera lié à vie par ce qu’il va vivre durant ces deux jours. » BB
Arrivées à ce stade, toutes les formations peuvent croire à la victoire finale. On sent dans vos propos que les résultats passés, qu’ils soient douloureux face à Berlin, encourageants cette saison face à Magdebourg et de plus en plus serrés avec Barcelone, ne changent rien : les compteurs sont remis à zéro ?
R.L : Il faut se détacher de ce qui a été facile, de ce qui a été très vécu, des moments heureux comme compliqués, pour pouvoir arriver avec une fraîcheur mentale et être capable de se concentrer exclusivement sur nous et sur ce que nous avons à faire sur ce week-end à Cologne. Ce serait, dans notre cas, une valorisation de toute la saison qui reste excellente. Certes, on a perdu Paris là-bas et le titre avec… Alors à nous de nous récompenser. Car oui, pour moi, toutes les cartes sont redistribuées. Quand je suis arrivé en février, plus tôt que prévu (ndlr : engagé pour rejoindre le H à la rentrée, les blessures combinées d’Aymeric Minne et Lucas de la Bretèche ont poussé le HBC Nantes à faire appel à ses services prématurément, une demande validée par Aix-en-Provence), je savais que l’on pouvait aller chercher quelque chose. Et cette Ligue des Champions est celle qui reste sur la liste.
BB : Des Final Four, on n’en joue pas 10 dans une carrière. Alors avoir l’opportunité d’être présent à Cologne une deuxième fois et déjà exceptionnel. On y va pour jouer crânement notre chance. Cela arrive après le championnat… et il n’y aura plus rien après ! Plus rien au calendrier, mais aussi plus rien pour cette équipe dans sa configuration actuelle, puisque l’effectif va être en partie modifié (ndlr : le natif de Lyon quittera la cité des ducs cet été). Alors, à nous de lâcher les chevaux dans la bataille. Bien sûr que le challenge est énorme… Maintenant, en début de saison, l’objectif annoncé était le titre de champion : on a affiché clairement cette ambition, il nous échappe de peu. Cela doit être un moteur supplémentaire. Sur le plan personnel, retourner à Cologne, avec un autre club, avec toutes les difficultés que j’ai rencontrées depuis mon arrivée à Nantes, est une chance extraordinaire. Maintenant, j’espère que ce sera avec la meilleure fin possible. Ce qui est en revanche déjà certain, c’est que ce collectif sera lié à vie par ce qu’il va vivre durant ces deux jours.
Recueilli par Gaëlle Louis